Roger Hiorns (*1975, Birmingham, GB) est un artiste majeur de sa génération. Son travail Seizure a été sélectionné pour le célèbre Prix Turner. Encensée par la critique, l’oeuvre consiste en une cristallisation massive d’un appartement londonien abandonné. L’exposition présentée d’abord au Centre d’art CentrePasquArt puis à la Galerie Rudolfinum à Prague sera jusqu’ici sa plus grande exposition individuelle. Les installations et sculptures de Roger Hiorns engendrent et comblent des lacunes entre des idées opposées : construction et déconstruction, théologie et technologie, fugacité et permanence, contrôle autoritaire et spontanéité. Son travail se caractérise par une présence matérielle et fonctionnelle qui est cependant toujours rattachée à un sens de l’imaginaire, du poétique ou de l’ésotérique. Lors de son exposition au Centre d’art CentrePasquArt, Roger Hiorns réalisera notamment une installation constituée de 200 pièces de moteurs de voitures qui envahiront l’espace à disposition.

L’œuvre de Roger Hiorns nous questionne sur la manière dont les problèmes sociaux peuvent être abordés au travers de l’adaptation de divers objets. La construction de l’installation des beings réalisés à partir de pièces de moteurs de voitures, dont certains sont envahis de mousse, a été influencée, par exemple, par les problèmes environnementaux courants. Mais encore, ces 200 objets représentent l’idée selon laquelle les êtres humains entretiennent des rapports humiliants les uns avec les autres. Pour Hiorns, la crise de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) sévissant en Angleterre en 2001 est un exemple flagrant de la priorité accordée par l’Etat aux besoins de l’industrie plutôt qu’à la santé de la population. La figure anthropomorphique de ces beings nous invite à leur accorder des valeurs telles qu’une certaine sentimentalité, une perspective critique ou à leur manifester de la mesquinerie. Néanmoins, les beings demeurent une entité unique, amorphe et commune symbolisant une population harmonieuse.

Les événements et les problématiques socio-politiques actuels sont également des thèmes importants dans la série de sculptures youth en cours. Ces dernières consistent en des objets tels que des bancs de rue, des moteurs d’avions et des tables en acier inoxydable « activés » par la présence d’un jeune homme nu et d’un petit feu. Les séries abordent de nombreux thèmes, du rôle du hasard et des facteurs externes à l’exécution d’une œuvre, jusqu’à la connexion créée entre les performances du jeune homme et le regard des visiteurs. Elles reflètent aussi ce que Hiorns décrit comme suit : « Ces surfaces nous entourent dans chaque aspect de nos vies, que ce soit à la maison, au travail ou lors de nos voyages, et sont mises à disposition et formalisées pour nous. Cela subsiste dans mon esprit lorsque je crée les œuvres youth dans lesquelles je tente de trouver mais aussi d’accentuer les lacunes de l’opinion du monde néo-libéral de manière délicate… Ainsi, cela exclue quiconque qui n’y prend pas part. »

Fondamentalement, les sculptures youth sont un présent constant, une intemporalité rendue possible grâce au renouveau constant des différents performeurs. Les thèmes du corps et du temps relient toutes les œuvres de l’exposition. La collection de photographies de l’artiste, dont certaines ont été trouvées et d’autres prises par lui-même, est représentée par une sélection de plans qui mettent l’accent sur la matière corporelle. Un autre groupe d’œuvres, composé de haut-parleurs enroulés de feuilles de latex, suggère une réflexion sur l’esprit et sur l’éthique du corps humain. Le latex est peint avec de la matière cérébrale de vache, représentant ainsi un soupçon d’esprit cognitif sur la surface de l’œuvre. Les haut-parleurs émettent des émissions de radio d’un programme de la BBC qui analysent, en termes de médecine, de science ou de religion, notre rôle sur terre et comment nous devons négocier avec le futur. Par exemple, l’un des programmes concerne un homme musulman mourant, discutant avec sa famille sur le meilleur moyen de mettre fin à ses jours.

Peu disposé à l’idée de fournir des réponses précises à des sujets complexes ou de dissiper l’ambiguïté entre les problèmes sociaux et éthiques contemporains, Hiorns est sans compromis face à sa position : « Je suis un artiste qui produit de l’art, et non de l’art à propos de l’art. Je ne suis pas intéressé à l’idée de ruminer sur des idées déjà existantes pour leur avantage financier. Même si cela peut paraître fantasque, je crois que le rôle de l’artiste est de nous faire réagir, à l’aide d’un miroir révélant la réalité de la société dans laquelle on vit de sorte à ce que le progrès puisse continuer. »

Roger Hiorns a étudié les beaux-arts à Goldsmiths, Université de Londres. Ses travaux ont été exposés dans de nombreuses expositions collectives en Europe et aux Etats-Unis, entre autres à : Venice Biennale (2013); MoMA PS1 Contemporary Art Center, Long Island City, NY; Tate Modern, Londres;  Armand Hammer Museum of Art à l’UCLA, Los Angeles; et Walker Art Center, Minneapolis. Expositions personnelles: MIMA, Middlesbrough, Angleterre (2012); De Hallen Haarlem, Pays-Bas (2012-13); The Hepworth, Wakefield, Angleterre (2014) et Kunsthalle Wien, Vienne, Autriche (2014). Roger Hiorns vit et travaille à Londres.

Publication : Une publication avec des vues de l’exposition paraîtra durant l’exposition.